Ne pas confondre : "Commander" et "Être livré" !

Olivier Véran, le ministre de la Santé a annoncé ce samedi 28 mars 2020 que la France avait "commandé un milliard de masques" ; espérant ainsi rassurer la population.

À toutes fins utiles, je me permets de rappeller la définition du verbe "Commander" dans cette acception : il signifie "Demander la fabrication, la fourniture ou la livraison de quelque chose".

Rien de plus.

Par conséquent, lorsqu'un produit est parfaitement indisponible, parce que demandé par tout le monde au même moment, sans que le ou les fabricants ou vendeurs ne puissent aucunement faire face à la demande, on peut très bien commander autant d'exemplaires que l'on veut sans pour autant recevoir quoi que ce soit !

Le fervent collectionneur que j'ai longtemps été a souvent été confronté au problème, lors de la parution de livres à tirage limité, dont la demande excédait de beaucoup l'offre disponible.

Dans ce cas de figure très courant et bien connu, TOUS les collectionneurs invétérés ne manquent pas de "COMMANDER" ledit ouvrage auprès du maximum de librairies possible... "AU CAS OÙ", par extraordinaire, l'une d'entre elle se retrouverait dans la situation de pouvoir miraculeusement leur livrer UN exemplaire du précieux article !

De la même façon : après le massacre d'une partie de sa rédaction, le 7 janvier 2015, par les frères Chérif et Saïd Kouachi, la rédaction de "Charlie Hebdo" avait publié, le 15 janvier suivant un n° 1178 ("Tout est pardonné") que des millions de personnes avaient souhaité acheter, au nombre desquels je figurais, comme nombre d'entre vous très vraisemblablement...

Si vous vous en souvenez, il a parfois fallu attendre des semaines et passer chaque jour dans de nombreux kiosques et maisons de la presse, puis s'inscrire sur des listes d'attente, avant de pouvoir - enfin - acquérir un exemplaire de ce numéro, qui s'est vendu au total à 4 millions d'exemplaires... mais après moult tirages et retirages successifs.

Lorsqu'il y a pénurie, "commander" ne signifie strictement RIEN !

Dire aujourd'hui, comme l'a fait Olivier Véran, que l'État et les différentes collectivités publiques françaises ont "commandé partout dans le monde où cela était possible plus de un milliard de masques" n'est... que du vent.

Ou plutôt : de la simple communication politique !

* D'abord parce que ce milliard de masques aurait dû être en stock puisque nous en avions 1,723 milliard en 2009 et encore 1,4 milliard en février 2011, avant que nos dirigeants n'oublient ce que "prévention des risques" signifiait,

* et que leur impéritie ne les amènent à décider de supprimer ces stocks, afin de réaliser quelque chose comme - au grand maximum - 100 ou 200 millions d'euros d'économies... qui vont nous coûter plusieurs dizaines de milliards d'euros et plonger notre pays dans une crise sanitaire, économique et sociale sans précédent,

* ensuite parce que depuis le début janvier 2020 il s'est écoulé pas moins de 14 semaines durant lesquelles "commander" ces masques aurait encore eu un sens,

* et enfin parce que ce milliard de masques sera soit d'un niveau de qualité pitoyable pour avoir été fabriqué en sous-traitance sans aucun respect des normes en vigueur soit livré dans seulement des mois et des mois, pour ne pas dire des trimestres...

Enfin... je vais tout de même en commander personnellement un petit milliard de plus, par sécurité...

De toute façon, je ne risque bien évidemment pas d'être livré.

Mais je pourrai toujours dire que j'ai passé des commandes et brandir mon bon de commande...

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