La scène se passe en décembre 1998, à Paris (75). Ma fille aînée a 3 ans et demi et nous sommes allés au cinéma voir un film d'animation avec un couple d'amis et leur fille.
Comme nous nous sommes à l'évidence profondément assoupis tous les deux sur la fin, nous nous faisons légèrement chambrer par mon ami pendant que nous nous rhabillons à moitié endormis ; ce qui n'est manifestement pas du goût de ma fille.
Celle-ci est extrêmement débrouillarde et je la laisse donc se rhabiller seule malgré son jeune âge (chaudement car il gèle à pierre fendre) en bougonnant ; me contentant de finir de remonter la fermeture à glissière de son anorak et d'ajuster son écharpe et son bonnet.
Une fois parvenus au véhicule de mes amis, toutefois, je m'inquiète soudain de savoir si ma fille a bien mis son chandail avant d'enfiler son anorak...
Moi : "Au fait, ma chérie, tu as bien mis ton chandail sous ton anorak ?
Ma fille : Bien ennuyée par la question... "Ah non papa : j'ai oublié de le mettre" !
Moi : "Mais c'est pas vrai ! Alors il est resté là-bas, dans la salle ; heureusement que j'y pense maintenant..."
Mon ami : "Que se passe t-il ?"
Moi : "Ma fille a oublié son chandail dans la salle ; attendez-moi au chaud dans la voiture : j'y retourne et je reviens aussi vite que possible, c'est à 200 mètres à peine".
Mon ami : "Je viens avec toi ; on trouvera plus rapidement : la salle était immense".
Arrivés dans le hall d'accueil du cinéma, nous nous apprêtons à retourner dans la salle où nous étions dix minutes plus tôt, lorsque une ouvreuse nous apostrophe en nous demandant ce que nous faisons...
Mon ami : "La fille de mon ami a oublié son chandail dans la salle et nous allons le chercher vite fait".
L'ouvreuse : "Ah non messieurs, vous ne pouvez pas retourner dans la salle car il y a déjà des spectateurs pour la prochaine séance. Mais je peux envoyer quelqu'un vous le chercher. Comment est-il et où étiez vous assis s'il vous plaît ?".
Moi : "C'est un chandail rouge pour enfant de 7-8 ans (oui ; je sais : nous sommes assez costauds dans la famille !) et nous étions assis vers le milieu de la salle...".
Mais la personne partie dans la salle revient, à peine deux minutes plus tard, les mains vides en nous affirmant qu'il n'y a aucun vêtement oublié dans la salle...
Mon ami commence alors à s'agacer, expliquant qu'un petit chandail rouge ayant glissé entre des fauteuils rigoureusement de la même couleur ne se repère certainement pas facilement. Et que ce n'est pas en une minute qu'une seule personne peut ainsi affirmer de façon péremptoire que le vêtement en question n'est pas là.
Les deux jeunes femmes n'apprécient pas la remarque et le ton commence à monter. L'arrivée de plusieurs autres membres du personnel ne fait malheureusement qu'envenimer les choses ; mon ami s'énervant réellement et commençant à bousculer tout ce petit monde afin de pénétrer en force dans la salle : "Viens Jipé, on va le retrouver ce chandail !".
Bien que d'ordinaire - à l'époque tout du moins ; je me suis calmé avec l'âge... - prompt à ce genre de pratique, je fais cependant preuve cette fois-là - très étonnamment - d'une grande sagesse et parviens à convaincre mon ami excédé de sortir avant que les choses ne dégénèrent, en lui expliquant que l'on n'allait tout de même pas mettre ce cinéma à sac pour un simple chandail !
Une fois sur le trottoir et jusqu'à la voiture, mon ami continue de maugréer tout ce qu'il sait, pestant à cor et à cri contre ce fichu cinéma !
Il finit tout de même par se calmer durant le trajet qui nous mène au restaurant chinois dans lequel il nous avait tous invité à dîner ce soir là. Et c'est donc détendus et contents de nous retrouver bien au chaud que nous nous installons tous autour d'une grande table ronde.
À peine déshabillé et assis, cependant, mon visage se fige soudainement, attirant un regard interrogatif de mon ami. Atterré, je lui indique alors ma fille du menton, mais il ne comprend pas...
Mon ami : "Qu'est-ce qu'elle a ta fille Jipé ?".
Moi : "Le chandail : elle l'a sur elle !"...
Mon ami : "Oh p....n ; c'est pas vrai !".
Ayant ôté son anorak, ma fille - tout sourire et toute fière, les baguettes à la main - arborait paisiblement son joli petit chandail rouge pour lequel mon ami avait failli se battre 25 minutes plus tôt !
Si cela ne s'appelle pas faire battre des montagnes !