"Un laïus" ou "Faire un laïus".

J'aime beaucoup le petit substantif masculin latin "Laïus", qui désigne :

  • dans le langage courant : un petit discours,

On dit par exemple : "Pour la cérémonie des voeux, le président va encore nous faire son laïus habituel".

  • mais surtout, dans le registre familier, où on l'utilise de façon péjorative, afin de discréditer l'orateur (ou l'auteur) : une allocution, un discours (ou un texte) souvent long, creux, vague ou emphatique, dont le ton ampoulé et la banalité des propos tenus sont ennuyeux pour l'auditoire ou le lectorat.

On dit par exemple : "Avec J'aime les mots, je m'efforce de founir des définitions et des explications simples et claires, plutôt que des laïus du type de ceux que fournissent parfois certains blogues ou sites".

On l'ignore souvent, mais ce mot "laïus" nous vient du nom latin de "Laïos", un personnage de la mythologie grecque, fils de Labdacos, roi de Thèbes, et père... d'Oedipe !

Et le sens actuel du mot "laïus" ainsi que de la locution verbale "Faire un laïus" remonte au concours d'entrée à l’École polytechnique organisé en 1804 (année de sa militarisation par Napoléon 1er).

Cette année-là, en effet, on proposa aux candidats comme sujet de composition "Le Discours de Laïus. Imaginez la réponse de Laïus à Oedipe" (*), lorsque ceux-ci se croisèrent sans se connaître sur une route étroite et se querellèrent au sujet de la priorité.

Ce sujet eut un vif succès, et les candidats, particulièrement inspirés, écrivirent de nombreuses pages d'une qualité très variable, justifiant ainsi, par la suite, le sens du mot "laïus", qui signifia d'abord pour les élèves toute composition ou dissertation, pour ensuite passer dans le langage courant, avec la définition que nous lui donnons actuellement.

Rappel du mythe :

Laïos n'a qu'un an à la mort de son père, Labdacos, roi de Thèbes, et la régence est donc confiée à son grand-oncle Lycos. Lorsqu'il atteint sa majorité, Laïos, au lieu de monter sur le trône, est chassé de Thèbes et trouve asile auprès du roi Pélops.

Celui-ci lui confie son fils Chrysippe, en lui demandant de lui apprendre l'art de conduire un char. Laïos s'éprend de son jeune élève, l'enlève pendant une course de chars et le viole. Accablé de honte, Chrysippe se serait alors pendu. Selon une autre version, il aurait été assassiné par ses demi-frères à la demande de leur mère Hippodamie. Pélops appelle alors sur Laïos la malédiction d'Apollon.

Après que Zéthos- qui régnait sur Thèbes avec son jumeau Amphion- s'est donné la mort, Laïos devient roi de Thèbes et épouse Jocaste. Mais un oracle de Delphes avertit Laïos que si un héritier mâle lui naît, celui-ci tuera son père et épousera sa mère. Laïos, prudent, se garde alors de toute relation avec son épouse. Une nuit pourtant, sous l'emprise de la boisson, il fait l'amour avec Jocaste. Et de leur union naît un fils : Oedipe. Pour conjurer l'oracle, il fait exposer l'enfant sur le mont Cithéron. Mais Oedipe est recueilli par un berger qui le confie au roi de Corinthe, Polybe. Et Oedipe est donc élevé loin de Thèbes, dans l'ignorance de sa véritable origine et de son adoption.

Des années plus tard, Oedipe apprend par l'oracle de Delphes que sa destinée est de tuer son père et d'épouser sa mère. Croyant être le fils naturel de Polybe, il décide de s'enfuir loin de Corinthe afin d'empêcher l'accomplissement de la prophétie.

Mais lors de sa fuite, il croise son père biologique, Laïos, sur une route étroite. Oedipe laisse passer le convoi du roi de Thèbes, mais les deux personnages se querellent au moment de décider qui devra garer son char sur le côté pour laisser passer celui de l'autre (dans une autre version, un écuyer tue l'un de ses chevaux). Une bagarre éclate alors, au cours de laquelle Laïos est tué par son propre fils. Ainsi, la première partie de la malédiction se réalise-t-elle.

(*) : L'enseignement des mythologies grecque et romaine étant devenu ce qu'il est, je frémis à l'idée des copies que nous rendraient les candidats actuels... mais on va encore me traiter de dinosaure et de vieux ronchon !

Sources : Google, www.linternaute.fr, wikipedia.fr et www.larousse.fr

"Tous les chemins mènent à Rome".

Cette expression du langage courant est une expression proverbiale d'origine latine pouvant avoir différentes significations et relever de différents contextes selon l'époque où l'on se situe : géopolitique, religieux ou philosophique.

  • de nos jours, elle relève de la philosophie et signifie, au sens figuré : il existe une multiplicité de moyens pour parvenir à une même fin. Autrement dit, on peut atteindre un objectif ou obtenir un résultat de différentes manières, même si certaines peuvent parfois se révêler plus longues et plus complexes que d’autres.
  • dans l'Antiquité, elle relevait de la géopolitique et évoquait, au sens propre, le réseau routier de l'Empire romain, dont toutes les voies convergeaient vers Rome, où Auguste avait fixé le point zéro des routes impériales, permettant de calculer les distances, depuis Rome, des principales villes de l'Empire.

De fait, à l'époque, toutes les routes impériales menaient donc à Rome.

Les voies romaines impériales en Italie, qui, toutes, mènent à Rome
Les voies romaines impériales en Italie, qui, toutes, mènent à Rome
  • au Moyen Âge, elle relevait de la religion, Rome, la cité du Pape étant devenue la principale destination des pèlerinages chrétiens, à la suite de la domination arabe de Jérusalem (640) et jusqu'au début du culte de saint Jacques, à Compostelle (Galice) (Espagne), au Xe siècle.

On avait alors attribué au pèlerin se rendant à Rome le sobriquet de "Romieu", "Roumieu" ou "Romée".

Et les Musulmans appelaient tous les Chrétiens "Roumieh" ou "Roumi", un mot qui a perduré jusqu'à l'époque contemporaine.

Sources : wiktionary.org, wikipedia.org, www.expressio.fr et www.larousse.fr

"À qui mieux mieux".

J'aime beaucoup cette amusante locution adverbiale signifiant : à l’envi l’un de l’autre ; à qui fera mieux que l’autre.

Si l'on se réfère au dictionnaire de Bescherelle de 1856, il s’agirait d’une ellipse de la phrase : "Nous vous aimons À (ce point et de telle façon que celle) QUI (de nous deux vous aime déjà) MIEUX (que l’autre, vous aime encore) MIEUX".

On dit par exemple : "Le premier débat de l'élection présidentielle états-unienne de 2020 était lamentable : les deux candidats s'invectivaient à qui mieux mieux".

Ou : "Dans leur saynète Les coiffeuses, les Chevaliers du fiel déversent leur fiel à qui mieux mieux".

"À loisir" ou "Tout à loisir".

Ces deux locutions adverbiales signifient : à son aise, à sa commodité, sans se presser, sans hâte, en prenant son temps.

On dit par exemple : "Quand je serais à la retraite, je pourrai, à loisir, développer J'aime les mots".

Ou : "Quand tu seras dans ta nouvelle maison, tu pourras ranger tout à loisir tes collections".

Sources : wiktionary.org et www.larousse.fr

"Il n'y a pas 36 solutions".

Cette expression française du registre familier en forme d'idiotisme numérique signifie : il n'y a pas à hésiter, il n'y a pas d'alternative, il n'y a pas de choix, il n'y a pas tant de choix que ça.

On dit par exemple : "Tu ne peux pas continuer comme ça. Il n'y a pas 36 solutions : tu dois parler à ton père" !

Source :www.languefrancaise.net

"À damner un saint", "À damner tous les saints", "À damner tous les saints du Paradis", "À faire damner un saint", "À faire damner tous les saints" ou "À faire damner tous les saints du Paradis".

Ces différentes locution adverbiales en forme d'idiotisme religieux appartiennent au registre familier et signifient : qui procure un plaisir des sens incroyable, d’une intensité extrême.

On dit par exemple : "Cette fille avait une cambrure de reins à damner un saint".

Ou : "Cette tarte aux myrtilles était bonne à damner tous les saints".

Sources : wiktionary.org et www.languefrancaise.net

"Mettre à sa sauce (quelque chose)" ou "Mettre à toutes les sauces (quelque chose)".

Ces deux locutions verbales du registre familier en forme d'iditiotisme culinaire signifient respectivement :

  • "Mettre à sa sauce (quelque chose)" : arranger à sa façon.On dit par exemple : "Voilà ; tu sais tout. Tu n'as plus qu'à mettre cela à ta sauce pour présenter la chose à ton patron".

Ou : "Ne t'inquiète pas pour mes parents, j'ai mis cette histoire à ma sauce, afin qu'ils ne s'inquiètent pas".

  • et "Mettre à toutes les sauces (quelque chose)" : utiliser souvent et n'importe comment ; instrumentaliser à volonté quelque chose de toutes les façons, de toutes les manières, dans tous les registres, sous toutes les formes. Et ce, tout le temps et à tout propos.

On dit par exemple : "Ce conte a été mis à toutes les sauces".

Ou : "Mettre cette citation à toutes les sauces comme on l'a fait lui a fait perdre sa pertinence".

Sources : wiktionary.org et www.languefrancaise.net

"Un linceul n'a pas de poches" ou "Les linceuls n'ont pas de poches".

L'expression proverbiale en forme d'idiotisme textile "Un linceul n'a pas de poches" ou "Les linceuls n'ont pas de poche" signifie,  de manière imagée, dans le registre familier : on ne peut rien emporter avec soi lorsque l'on meurt et il n'est donc guère utile de mourir riche, si cela n'est pas pour en faire profiter les autres - et en particulier ses proches - après sa mort.

Elle s'utilise notamment pour commenter de façon ironique le comportement de personnes très âgées ou très malades faisant preuve d'une certaine avarice vis-à-vis des leurs.

La formule"Un linceul n'a pas de poches" a servi de titre au roman états-unien écrit en 1937 par Horace McCoy et publié en France, en 1946, dans la célèbre "Série noire" de Gallimard.

Le roman états-unien "un linceul n'a pas de poches" publié en 1937 par Horace Mac Coy et édité en France, en 1946, dans la Série noire de Gallimard
Le roman états-unien "un linceul n'a pas de poches" publié en 1937 par Horace Mac Coy et édité en France, en 1946, dans la Série noire de Gallimard

Ainsi qu'au film français du même nom, qu'en a tiré en 1974, le réalisateur Jean-Pierre Mocky.

Affiche du film français "Un linceul n'a pas de poches", de Jean-Pierre Mocky (1974, d'après le roman états-unien homonyme, écrit en 1937 par Horace Mac Coy
Affiche française
Affiche belge du film français "Un linceul n'a pas de poches", de Jean-Pierre Mocky (1974, d'après le roman états-unien homonyme, écrit en 1937 par Horace Mac Coy
Affiche belge du même film

Source : wikipedia.org

"Louper le coche", "Manquer le coche" ou "Rater le coche".

Ces différentes locutions verbales du registre familier signifient : laisser passer une belle occasion, rater une opportunité.

Et elles font référence au "Coche", un ancien type de véhicule hippomobile.

On dit par exemple : "Pete Best, Henry Padovani, Seymour Brussel et Gilles Petit : tous ont en commun d'avoir raté le coche, en quittant respectivement The Beatles, The police, Les inconnus et Les chevaliers du fiel avant qu'ils ne connaissent le succès !".

Sources : www.cnrtl.fr, www.expressio.fr, wiktionary.org et www.linternaute.fr

"Être droit comme un i", "Être droit comme un cierge" ou "Être droit comme un piquet" et "Se tenir droit comme un i", "Se tenir droit comme un cierge" ou "Se tenir droit comme un piquet".

Ces différentes locutions adjectivales du registre familier font référence à la forme rectiligne des trois objets évoqués : la lettre "i", un cierge et un piquet :

Lettre "i" majuscule
Lettre "i" majuscule
Un cierge blanc
Un cierge blanc
Un piquet de châtaignier
Un piquet de châtaignier

Et l'ensemble de ces expressions signifient donc :

  • pour une personne : être ou se tenir très droit, avec raideur,

On dit par exemple : "Malgré ses 92 ans, le vieillard était toujours droit comme un i".

  • ou pour un arbre par exemple : être parfaitement droit, rectiligne.

On dit par exemple : "L'allée était constituée d'une rangée de pins droits comme des cierges".

"Être droit comme un cierge" et "Se tenir droit comme un cierge" sont des idiotismes religieux.

Sources : wiktionary.org

"Bon sang de bois !" ou "Bon sang de bonsoir !".

J'adore ces expressions du registre familier et du registre désuet en forme d'interjection, qui marquent l'étonnement ou l'indignation.

Et que j'utilise régulièrement dans J'aime les mots.

On dit par exemple : "Je ne supporte plus les anglicismes bon sang de bois !".

Ou : "Bon sang de bonsoir : je n'en peux d'entendre ces tics de langage, ces mots, locutions ou expressions à la mode et ces pléonasmes à longueur de journée !".

L'origine de ces deux formules est très ancienne. Elle trouve même son origine au Moyen Âge, lorsqu'il existait de nombreux jurons comportant le nom de Dieu. Ce qui était par exemple le cas de "Par le sang de Dieu", "Nom de Dieu" ou "Bon sang de Dieu".

La mention de Dieu étant considérée comme blasphématoire par le clergé devenu extrêmement puissant au XVe siècle, le nom de Dieu a disparu, cédant la place à des formules du type "Palsambleu", "Bon sang de bois" ou "Bon sang de bonsoir", qui évitaient d'avoir à le prononcer.

"Bon sang de bois !" est un idiotisme botanique et un idiotisme corporel.

Et "Bon sang de bonsoir !" est un idiotisme corporel.

"Mettre dans le même sac".

Cette expression du registre familier signifie : englober dans une même réprobation.

On dit par exemple : "Pour moi, tous ces types ne sont que des charlatans : je les mets tous dans le même sac !".

Source www.larousse.fr